đ Constitution GuinĂ©enne de 2025 : Entre Innovations et Consolidation du Pouvoir ExĂ©cutif
CONAKRY â đŹđł âą GN +224 âą PromulguĂ©e le 26 septembre 2025 aprĂšs un rĂ©fĂ©rendum national, la nouvelle Constitution guinĂ©enne marque l’avĂšnement d’une « QuatriĂšme RĂ©publique ». Portail GuinĂ©e a menĂ© l’enquĂȘte pour dĂ©crypter article par article les avancĂ©es, les ambiguĂŻtĂ©s et les Ă©quilibres rĂ©els de cette Loi fondamentale prĂ©sentĂ©e comme « la Constitution de la stabilitĂ© ».
âïž LES GRANDES INNOVATIONS INSTITUTIONNELLES
Un Exécutif Reconfiguré
L’article 44 instaure un mandat prĂ©sidentiel de 7 ans, renouvelable une seule fois, alignant la GuinĂ©e sur des pays comme le Cameroun ou le Congo-Brazzaville. Le gouvernement justifie ce choix par la nĂ©cessitĂ© de stabilitĂ©, tandis que l’opposition y voit un verrouillage politique.
« Ce mandat long peut favoriser la planification, mais dans un systÚme sans garde-fous solides, il devient un instrument de verrouillage politique », analyse le constitutionnaliste Dr. Mamadou Bah Oury.
L’article 46, particuliĂšrement controversĂ©, abroge la Charte de la Transition et ouvre la voie Ă la candidature du gĂ©nĂ©ral Mamady Doumbouya et des autres membres de la junte. Pour la coalition au pouvoir, c’est une normalisation. Pour l’opposition, c’est la « constitutionalisation du coup d’Ătat ».
La Naissance du Bicamérisme
La crĂ©ation d’un SĂ©nat (articles 109-110) transforme le Parlement en institution bicamĂ©rale. ComposĂ© pour un tiers de membres nommĂ©s par le prĂ©sident et deux tiers Ă©lus indirectement, il est prĂ©sentĂ© comme un outil de dĂ©centralisation.
« En thĂ©orie, c’est une chambre territoriale. En pratique, c’est une chambre de consolidation du pouvoir central », observe Kabinet Fofana, analyste pour ConstitutionNet.
Une Justice sous ContrĂŽle
La Cour spĂ©ciale de justice reprĂ©sente l’innovation majeure en matiĂšre de reddition des comptes. CompĂ©tente pour juger le prĂ©sident, le Premier ministre et les ministres, elle s’inspire des modĂšles rwandais et bĂ©ninois.
« Elle peut soit incarner la reddition des comptes, soit devenir un sanctuaire d’impunitĂ© », avertit Me Robert Sarah Mano, juriste et ancien conseiller au ministĂšre de la Justice.
La Parité en Marche
Le texte constitutionnel consacre des mesures de paritĂ© avec un objectif de 30% de femmes aux postes Ă©lectifs et nominatifs. Cette avancĂ©e symbolique forte devra ĂȘtre concrĂ©tisĂ©e par des lois d’application pour produire des effets tangibles.
đ LES ZONES D’OMBRE ET POINTS DE VIGILANCE
Un Processus Contesté
Selon plusieurs observateurs, la rĂ©daction du texte a Ă©tĂ© pilotĂ©e par le cercle prĂ©sidentiel, avec une participation restreinte de la sociĂ©tĂ© civile et de l’opposition. Le rĂ©fĂ©rendum s’est tenu dans un contexte de contrĂŽle Ă©troit de la communication publique.
Des Droits Sociaux Sans Financement
L’article 22 fait de la santĂ© un droit constitutionnel et reconnaĂźt l’Ă©ducation, le travail et le logement comme des « devoirs de l’Ătat ». Cependant, aucun mĂ©canisme de mise en Ćuvre ni de financement n’est prĂ©cisĂ©, laissant ces avancĂ©es au stade dĂ©claratif.
Un Verrouillage Démocratique
La rĂ©vision constitutionnelle est verrouillĂ©e pour 30 ans. Aucune modification ne pourra ĂȘtre initiĂ©e sans l’accord du prĂ©sident, et tout amendement devra ĂȘtre approuvĂ© par rĂ©fĂ©rendum avec un quorum de 60% de participation – une disposition rare en Afrique.
đ TABLEAU COMPARATIF DES AVANCĂES ET RECULS
Aspect | Avancées | Points de Vigilance |
---|---|---|
Pouvoir exécutif | Clarification des attributions | Concentration excessive des pouvoirs |
Pouvoir législatif | Création du Sénat | 1/3 des sénateurs nommés par le président |
Justice | Cour spéciale de justice | Indépendance des nominations à garantir |
Droits sociaux | Reconnaissance constitutionnelle | Absence de mĂ©canismes de mise en Ćuvre |
ParitĂ© | Objectif de 30% de femmes | Effet rĂ©el dĂ©pendant des lois d’application |
Processus démocratique | Fin de la transition | Verrouillage de la révision pour 30 ans |
đ CONCLUSION : UNE CROISĂE DES CHEMINS
La Constitution de 2025 ambitionne d’ĂȘtre le socle d’une nouvelle Ăšre politique en GuinĂ©e. Elle introduit des innovations institutionnelles notables comme le bicamĂ©risme et la Cour spĂ©ciale de justice, tout en reconnaissant des droits sociaux et la paritĂ©.
Cependant, comme le rĂ©sume l’universitaire Dr. Fanta KeĂŻta, « la GuinĂ©e se trouve Ă la croisĂ©e des chemins : soit elle construit une RĂ©publique durable, soit elle rĂ©invente un prĂ©sidentialisme fort sous un vernis dĂ©mocratique ».
La suite dĂ©pendra de l’application qui sera faite de ce texte, de la capacitĂ© des contre-pouvoirs Ă Ă©merger malgrĂ© les dĂ©sĂ©quilibres institutionnels, et de la vigilance constante des citoyens.
đ PORTAIL GUINĂE â L’information qui construit l’avenir
Analyse indĂ©pendante – Sources croisĂ©es : ConstitutionNet, Dubawa, BBC Afrique, entretiens experts.
Retrouvez l’intĂ©gralitĂ© du texte constitutionnel sur les sites officiels de l’AssemblĂ©e nationale et de la PrĂ©sidence de la RĂ©publique.
Prochain dossier : Les lois organiques, ultime recours pour rééquilibrer les pouvoirs ?